Aquaculture et parcs éoliens en mer ; une fausse bonne idée – Partie 2

29 Oct, 2023Atelier Anonymus0 commentaires

Aquaculture et parcs éoliens en mer ; une fausse bonne idée - Partie 1

Vers un développement massif conjugué de l’aquaculture et de l’éolien en mer.

 

PARTIE II

Nous avons vu dans la première partie de cet article ;

– des effets de la présence d’épaves en mer, l’évolution de leur nature liée aux « progrès industriels » et à la création de polluants résilients

– que l’écoconception économique actuelle s’oppose à l’écoconception écologique et est incompatible avec l’acceptabilité sanitaire de l’aquaculture dans les parcs éoliens en mer

– que l’écoconception économique du recyclage-matières des pâles de nouvelle génération n’est pas un cercle vertueux car elle entrave l’écoconception écologique et pérennise les pollutions toxiques

– que ni l’Union européenne ni la France ne sont capables de prendre les bonnes décisions environnementales à cause d’orientations industrielles et d’intérêts économiques supérieurs allemands qui orientent la politique énergétique française depuis de nombreuses années

– que des pêcheurs et des protecteurs de l’environnement font le choix de se rapprocher de l’industrie éolienne alors que les projets de pilotes éoliens flottants censés étudier les risques technologiques des futurs parcs ne sont qu’en phase d’installation ou pour le premier d’entre-eux à peine entré en production

Les avantages économiques d’associer aquaculture et éolien en mer peuvent-ils contrebalancer ou même surpasser les risques environnementaux et sanitaires ?

 

Des parcs éoliens aux effets apparemment favorables à l’aquaculture et à l’environnement

Transposons le quadriptyque d’effets positifs des épaves anciennes aux éoliennes en mer actuelles.

– L’effet de récif concerne les structures éoliennes immergées et la zone d’interface air-eau; mats, jackets, leurs protections par enrochements, les câbles flottants dans une moindre mesure, ou au sol et leurs protections de plaques de béton ou autres autour des câbles … les masses et les ancrages, tout élément immergé fixe ou flottant sur lequel un biofilm est capable de se développer et d’accueillir une flore et une faune sessiles, puis les espèces qui s’y déplacent, s’en nourrissent. Les espèces se répartissent selon différents gradients et des successions qui ne seront pas évoquées ici.

Tous ces supports attirent aussi des espèces de pleine eau et une faune vagile variée. Bien qu’elles ne disposent pas de la protection des cachettes d’une épave de bateau, elles sont, apparemment, favorables au vivant.

La biodiversité sessile enrichit également la zone en biomasse et en « visiteurs intéressés », d’autant plus pour un secteur sableux peu profond comme celui du projet, actuel, de Dunkerque.

Les enrochements de protection des structures supportant les aérogénérateurs, générant « des zones  de courants affaiblis », seront d’autant plus favorables aux crustacés et mollusques, à toute la flore et la faune intéressées dont des espèces de poissons démerso-benthiques et démersales. Une aubaine pour les caseilleurs et d’autres arts halieutiques possiblement autorisés dans les parcs.

– L’effet d’habitat (de réserve et selon les cas, de DCP) ne concerne évidemment pas distinctement les espèces fixées qui jouissent d’un effet de récif et d’habitat combiné, mais les autres « libres » qui demeurent sur place, de passage, s’y nourrissent, s’y reproduisent en pleine eau ou s’y cachent dans des enrochements.

Cet effet aura pour conséquences; une dynamique des biomasses, une diffusion d’oeufs, de larves, tant des espèces fixées sur les structures que des autres, des mouvements de juvéniles et d’adultes qui se déplaceront dans le parc et pourront en sortir.

Cet effet variera entre les bordures et le centre du parc selon l’orientation des courants et « les effets de freinage hydrauliques » des successions d’enrochements et mats ou jackets.

– L’effet de refuge est réel mais rare pour ce type de structures industrielles contrairement aux récifs artificiels conçus structurellement pour le prendre en compte.

– L’effet de débordement lié à l’ensemble des effets productifs de biomasse (dont l’effet de réserve et de DCP qui diffère entre les mats et leurs enrochements et les jackets et leurs bases) sera limité du fait de l’autorisation de certains arts de pêche dans le parc.

Cela aboutit pour certains, toutes proportions gardées, comme pour des récifs naturels, à estimer que les appuis aux fonctions écosystémiques procurés par ces quatre effets suffisent à considérer les parcs éoliens compatibles à se superposer ou à s’intégrer aux périmètres des Aires Marines Protégées, voire, pour pousser le raisonnement à son terme à créer un réseau d’AMP-Energétiques.

D’un coup on en oublierait presque qu’il s’agit d’installations industrielles dangereuses et polluantes soumises à la législation ICPE.

On en omettrait les multiples effets et impacts négatifs des parcs éoliens et de leurs organes connexes qui justifieraient logiquement une interdiction de présence de ces installations industrielles polluantes et et leurs associations aquacoles en mer.

 

Des impacts éoliens négatifs sur les quatre effets favorables

L’effet de récif : Il dépend de la composition de la structure qui en est le support et de sa localisation.

– L’effet récif d’un mat immergé qui évolue sur ses sections plus ou moins profondes est différent de celui de plaques de protections des câbles de transport d’électricité (CA ou CC) qui n’est pas le même que celui de blocs rocheux de protection. Du fait que la nature et la localisation des possibles polluants ne sont pas les mêmes.

En mesure d’atténuation les maîtres d’ouvrage annoncent souvent que les peintures utilisées pour protéger les mats et les jackets ne contiennent plus de biocides; pourtant, leur composition devrait être parfaitement connue afin de garantir leur absence d’impacts indésirables sur la flore et la faune fixée ou non sur les structures. Ce que nous savons de peintures utilisées dans d’autres parcs afin de résister aux caractéristiques agressives du milieu océanique et aux dégradations par le biofouling ne nous rassure pas outre mesure.

Si nos informations sont bonnes, le maître d’ouvrage du parc de Dunkerque a placé en caractéristiques variables discrètes les types de protections cathodiques entre lesquels il choisira le mode de protection anticorrosion des structures métalliques.

Nous n’allons pas développer ici le pour et le contre de chaque option, anodes sacrificielles ou à courant imposé, mais chacune aura son ou ses possibles impacts chimiques ou électro-chimiques sur l’eau de mer, les espèces fixées ou non, les végétaux et animaux présents y compris, bien évidemment ceux des cultures et élevages aquacoles qui pourraient être associés au parc éolien, ainsi que sur les ressources halieutiques prélevées.

– L’effet de récif des câbles de transport d’électricité (CA ou CC) semble logiquement être très limité voire exclu technologiquement du projet de Dunkerque pour ce qui est des câbles « de fond » puisque le maître d’ouvrage devrait procéder par ensouillage profond permis par les arènes et les vases présentes.

– Exclu sauf sur les espèces ensablées, envasées, sur l’eau de percolation et sur l’orientation des microbiotes avec une mention spéciale pour les espèces magnétotactiques et les conséquences de leur développement massif et de leurs possibles mutations.

Il existe de nombreuses techniques et matériels de protection des câbles de transport d’électricité selon les stratégies de poses qui sont initialement dictées par l’étude géotechnique puis la maîtrise des coûts (hydrodécapage, dynamitage, laser …).

Chaque choix et ensemble de décisions techniques impliquent des effets et impacts individuels et cumulés qui peuvent-être différents en nature et intensité sur l’environnement océanique. C’est du cas par cas.

Nous allons évoquer uniquement ici les câbles protégés par des plaques, qui ne sont pas toujours en béton, et souvent non jointives avec le temps, pour bien appréhender cet effet multiforme regroupant à lui seul ; « les effets ; de récif, d’habitat, de refuge et de débordement » qui concerne des parcs posés sur fonds rocheux ou variables.

Nous avons retenu le cas du homard européen mais des espèces de crabes ou de crevettes sont concernées à d’autres intensités comme toutes les autres espèces animales, voire végétales qui se retrouveraient dans la même situation avec des impacts variés selon leurs habitudes écologiques et leur distance aux câbles.

En premier lieu, les effets et impacts sont différents selon que les cables conduisent du courant alternatif (CA) ou continu (CC). Le cas du courant alternatif est retenu ici.

Voici venu le temps du conte ; « le câble et la homarde ».

 

« Le câble et la homarde »

« L’automne venu, une femelle homard s’étant livrée à des amours sportives avec un mâle vigoureux, ayant gratté d’un dactyle délicat les spermatophores déposés et provoqué la fécondation de sa ponte ovulaire, collée en masse aux pléopodes abdominaux de sa poche incubatrice, chercha, en effet, un refuge confortable pour passer la mauvaise saison et élever ses œufs.

Elle trouva pour ce faire un long serpent de plaques benthiques disjointes, déjà colonisées, comme un récif, dessus et dessous par une flore et une faune sessile et vagile.

« En effet, voici bien un habitat qui sied à mes besoins » constata-t-elle ; protecteur des attaques de congres et d’autres prédateurs, juste la place pour les pinces à l’entrée.

Un coup d’œil à droite, un à gauche et surtout pouvoir sentir les proies et les dangers par les antennes et les antennules. Vraiment parfait comme lieu de villégiature hivernale.

En plus, il y a quelque chose de noir qui émet une chaleur douce et des ondes qui me rendent toute chose.

Un peu comme le courant d’eau plus chaud que j’ai croisé en venant et qui est une nouveauté à cette période de l’année. Je n’en ai aucune trace dans ma mémoire épigénétique. Les parents n’ont pas dû connaitre. C’est peut-être un effet du changement climatique ?

Sous ma plaque à effets ; de récif, de refuge, d’habitat, je me sens bien. Bon, pour le moment on va éviter les débordements … Je suis là pour élever les petits et les petites. Ce n’est pas de tout repos.

Vous, les humains, vous êtes des mammifères, donc « homéothermes » c’est à dire que vous régulez votre température interne dans des limites strictes qui vous permettent d’optimiser vos métabolismes sans dépendre trop de la température externe. Vous êtes un peu comme les thons.

Nous les homardes, si, j’ose le féminin, on est féministes ou pas, nous sommes des invertébrées poïkilothermes, donc contrairement à vous notre activité est beaucoup plus dépendante de la température du milieu dans lequel nous vivons.

C’est important pour nous et nos œufs car la durée de leur développement qui passe par plusieurs stades larvaires dans l’œuf, puis, après la fin de la ponte larvaire (ouf ! Poche vide!), par plusieurs autres stades larvaires libres avant la métamorphose en petites homardes et homards est conditionnée par la température, d’habitude, assez stable à cette profondeur.

Si je vous explique cela c’est que le tube noir émet de la chaleur qui peut influer sur la vitesse de développement de mes œufs et des radiations qui peuvent les endommager et provoquer des malformations tératologiques.  

Pourtant, je m’en occupe bien de mes œufs puis des larves ; je les agite, je les brasse et les aère dans le courant d’eau que je génère par mes pléopodes.

Je plante des dactyles dans la masse à différents endroits et les fais vibrer (comme un marteau-piqueur) pour décrocher les œufs puis les larves mortes, les impuretés, les pathogènes.

Il faut dire que dans cette tâche je suis aidée par des expertes du nettoyage qui elles aussi sont sensibles à la chaleur et aux ondes émises par le câble.

Des bactéries endobiontes ou non, qui produisent des antifongiques et des bactério-statiques qui protègent mes petites et petits des attaques de champignons et du développement de bactéries qui font tant de ravages ailleurs.

En plus, je jeûne…Je suis une bonne mère, croyez-moi, mais comme plusieurs publications récentes le démontrent pour des champs d’ondes compatibles avec ceux émis par les câbles, les mortalités, les malformations provoquant une maladaptation à la nage de nombreuses larves, des retards de développement … mettent en péril tout mon travail. Et moi aussi je suis exposée.

Je vous dis pas mon analyse sanguine … je rentrerai à la CHU ; Clinique pour Homarde en Urgence.

Quand je vais sortir de mon trou pour reconstituer mes réserves en me sustentant ad libitum, je vais peut-être participer à l’effet de débordement et dans ce cas, je serai pêchée hors du parc ou dans celui-ci si la pêche aux casiers est autorisée. Je ne me le souhaite pas et à vous non plus!

Combien de homardes, de crabettes, de crevettes et d’autres animaux seront dans mon cas au contact d’un câble qui sera fonctionnel, avec « un effet de surprise » à chaque reprise de production, pendant les dizaines d’années d’exploitation des parcs utilisant des protections créant des abris, à priori, favorables à la faune océanique ?  

Quelles conséquences sur la survie de nos espèces et de celles qui en dépendent dans la chaine alimentaire ?

Quelles conséquences sur la pêche et votre alimentation ?

Morale :  » Homarde, si tu veux protéger les générations futures, il vaut mieux éviter le cable et de se faire plaquer  » .

G.N. et J.P.

 

Quels sont les autres effets négatifs directs et indirects éoliens possibles sur les quatre effets positifs ?

Peintures, polyuréthanes, huiles, bétons et adjuvants de bétons techniques et de plastiques, protections cathodiques, usure des pâles, PFAS, vernis, bisphénols et autres durcisseurs des résines époxydes, micro composites plastiques, incendies de nacelle et de pâles … libération massive de terres rares … vibrations, effet de blast, bruits aériens et sous-marins, basses et très basses fréquences, effets de sillages aéroliques et hydrauliques … et leurs impacts cumulés pour chaque parc et en interactions avec les voisins belges et les futurs ?

Tout dépend des choix des maîtres d’ouvrage dont les plus importants pour la composition initiale de son parc éolien ne seront pas connus distinctement lors de l’enquête publique.

Peut-être même pas avant que l’Etat délivre les autorisations ?

Dans le cas du projet de parc éolien de Dunkerque nous attendrons l’enquête publique avant de nous prononcer.

Une mise à jour de ; « Introduction aux risques éoliens en mer et biodiversité » sera publiée en mai 2024.

Il nous parait déraisonnable de placer des parcs éoliens en mer. D’autant plus en Aires Marines Protégées (AMP) et encore en y autorisant la pêche et l’aquaculture.

– Les parcs éoliens sont interdits dans les AMP intégrales et de « protection haute » dans de nombreux pays, mais pas en France pour ces dernières. Pourquoi ?

 

Des parcs éoliens dans des Aires Marines Protégées, mais oui, mais c’est bien sûr !

Beaucoup d’entre vous s’interrogent légitimement.

Comment la présence de parcs éoliens qui sont de l’industrie lourde toxique et polluante pourrait-elle décemment être compatible avec la protection écosystémique d’aires marines ?

Tout est question d’un mot et d’une définition. D’abord, le mot.

En matière de restauration des fonctions écosystémiques, seules « les AMP à protection intégrale » et à un niveau moindre ; « les AMP à protection HAUTE » sont efficaces. Toute protection inférieure ne présente pas d’utilité écosystémique mais « crée un emplacement réservé sans affectation réelle » contrairement aux Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) terrestres.

J’ai bien écrit ; « les AMP à protection HAUTE ».

C’est le terme retenu par l’accord international qui a défini les niveaux de protection des AMP.

La France, a choisi de remplacer le terme « HAUTE » par « FORTE ».

Rien ne s’y oppose juridiquement.

Voilà pour le mot … et pas que pour la forme.

Venons-en à la définition.

Prenons celle de la « protection FORTE à la française » ; « Espace naturel dans lequel les pressions engendrées par les activités humaines susceptibles de compromettre la conservation des enjeux écologiques de cet espace sont supprimées ou significativement limitées, et de manière pérenne, grâce à la mise en œuvre d’une protection foncière ou d’une réglementation adaptée, associée à un contrôle effectif des activités concernée. »

Il suffit que les pressions soient supprimées ou significativement limitées par des mesures d’évitement, de réduction, de compensation et qu’un suivi soit organisé ainsi qu’un contrôle effectif, ce qui devrait, normalement, être le cas de toutes les ICPE, pour qu’une activité industrielle soit estimée compatible dans une AMP.

Donc toutes les installations industrielles sont compatibles avec une AMP sauf à démontrer qu’il est impossible de supprimer les pressions ou « qu’elles ne sont pas significativement limitées » par la doctrine ERC-S.

La « limitation significative des pressions » relève de la plus HAUTE subjectivité de l’Etat et non des données scientifiques qui sont incomplètes, inadaptées ou le plus souvent inexistantes.

Le préliminaire à toute estimation de la compatibilité éolienne avec les AMP aurait été de réellement pratiquer pendant au moins huit années les « levées de doutes expérimentales in situ » sur des éoliennes en fonctionnement complétées par des études en laboratoires en tenant compte d’un véritable « point zéro » ; des effets et impacts physiques, chimiques et biologiques cumulés de chaque intrant technologique de chaque parc éolien.

Pas de « procéder à des levées de doutes » qui ne sont pas capables d’estimer « le doute raisonnable » pour chaque pression; effet et impacts, ni ceux cumulés, ni d’engager le principe de précaution si nécessaire, mais il est vrai que l’on ne trouve que ce que l’on veut bien chercher.

Dans un autre article, car ce n’est pas l’endroit, nous évoquerons les évolutions quantitatives et qualitatives de la politique de protection des AMP qui vise plus à protéger les capacités de co-usages économiques des territoires maritimes plutôt qu’à les protéger dans un but environnemental.

Simplement, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) considère à juste titre que les activités industrielles ne sont pas compatibles avec les AMP si elles portent atteinte aux objectifs de conservation.

Comment une activité industrielle qui impacte le milieu en le polluant et en le dégradant pourrait-elle être compatible avec la conservation et l’amélioration des services écosystémiques des AMP ?

Le représentant français s’est abstenu lors du congrès 2020 de l’UICN lors de l’adoption de la motion 066 en refusant l’interdiction des AMP à une partie de sa flotte de pêche.

C’est d’autant plus dommageable que les gains halieutiques d’une protection intégrale des AMP sont considérablement plus importants et pérennes que la pêche dans les AMP sous « protection forte à la française ».

La position française démontre une nouvelle fois un refus politique économico-idéologique de l’évidence biologique qui n’a pas rendu service à ses pêcheurs contrairement à ce que certains peuvent croire.

« Par ailleurs, les autorités françaises considèrent que les activités dans les aires protégées doivent être évaluées au cas par cas sur la base de données et de méthodes robustes, notamment sur la base d’évaluations d’impact environnemental ».

L’Etat français se refuse à protéger réellement les AMP pour ce qu’elles doivent être; des lieux de ressourcements écosystémiques permettant une amélioration de la biodiversité et de la production biologique locale qui profite naturellement à la pêche par son effet de débordement.

Il juge qu’il n’y a aucune raison de refuser à une industrie de s’y installer par une affirmation péremptoire et fausse car les évaluations des impacts environnementaux ne reposent pas, sauf cas très particuliers, sur des données et des méthodes robustes.

Les études d’impacts environnementaux sont un des socles de l’intégration des parcs éoliens dans les Aires Marines Protégées en démontrant la compatibilité « aberrante » de ces Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE).

La France défend une approche de cohabitation industrielle des AMP qui est bien pratique mais constitue un détournement de leur objet environnemental et un refus de placer le plus grand nombre dans un cadre juridique plus protecteur afin d’encore permettre un « en même temps environnementalo-industriel » délirant.

Quel orgueil que de croire être capable de supprimer les pressions ou de significativement les limiter et ainsi autoriser des co-usages qui pour être encore un peu durables seront insoutenables pour l’environnement océanique.

l’article L.334-1 du code de l’environnement définit les AMP qui peuvent accueillir une zone de protection forte.

Parmi celles-ci ; les sites Natura 2000.

Comme dans toutes les AMP de la liste, il sera possible d’installer des activités industrielles dans une zone de protection forte « à la française » le gouvernement n’a aucune raison d’épargner les sites Natura 2000, sauf à délocaliser les parcs en Zone Economique Exclusive (ZEE) en AMP ?

Nous avons vu que la France est favorable à la pêche dans les AMP.

Les pêcheurs sont évidemment favorables à leur participation à la co-gestion des AMP mais pas à l’envahissement océanique par les énergéticiens.

Ils ont peur à juste raison de perdre de nombreux territoires de pêche.

Ils exposent parfois violemment leur inacceptabilité économique et sociale de l’éolien en mer.

Comment le gouvernement pourrait-il les ramener, voire les rendre « à la raison » ?

 

Des pêcheurs pris dans « la nasse de la transition énergétique et de la décarbonation »

Comment continuer à sortir avec un coût du carburant qui flambe et entame lourdement la part de pêche de chacun ?

Comment assumer financièrement le remplacement des moteurs thermiques par des électriques ou des piles à combustible ?

Ou en attendant, pour bien moins cher se convertir à une part plus importante de biocarburants avec une ristourne de 13 centimes par litre ?

Sans une énergie accessible à un coût acceptable, pas de pêche.

Comment acheter l’acceptabilité économique et sociale des pêcheurs pour l’éolien et les autres EnR en mer ?

En proposant 450 millions d’euros sur dix ans issus de la taxe éolienne.

L’Etat participe à financer la transition énergétique de la pêche française et en échange les pêcheurs acceptent le développement massif des éoliennes et des autres EnR en mer. Ils n’ont pas le choix car pris à la gorge.

D’autant plus « étranglés financièrement » que les 736 millions d’euros alloués à la France par la Commission européenne sur la Réserve d’Ajustement du Brexit (RAB) ont déjà été affectés.

L’Etat organisera également la co-gestion par les pêcheurs des futurs parcs éoliens en y autorisant certains arts dormants ou trainants compatibles.

Les cultures marines végétales et animales seront permises, dans un premier temps, en lisière des parcs avec des variantes selon que les parcs seront fixés ou flottants avant leur intégration.

En définitive, la fuite en avant de « la création massive d’Aires Marines Protégées de papier » sans plus de protection que les zones à l’entour a eu du bon puisque l’absence de protection intégrale de ces grandes zones, contrairement aux petites créées jusqu’à la fin des années 1970, et les faiblesses constitutives volontaires de la « protection forte à la française » n’empêchent en rien l’industrialisation océanique massive.

– L’Etat ne peut-il pas initier avec les organisations professionnelles de la pêche et des cultures marines une politique récifale artificielle nationale aussi bien pensée que dans des pays, par exemple asiatiques, et privilégier une écoconception intégrale de récifs artificiels AMTI très productifs?

– Tout en respectant les fonctionnalités écosystémiques des AMP en augmentant considérablement le nombre de réserves intégrales qui du fait de leur protection stricte seront très favorables à la résilience océanique et aux pêcheurs par un vrai effet de débordement?

Le gouvernement se sent-il obligé de poursuivre ses errements ?

– En ne protégeant pas un réseau d’Aires Marines Protégées « digne de ce nom » alors qu’il participerait pleinement à l’effort de résilience écosystémique face aux évolutions climatiques qui contribuent avec la pollution généralisée à l’effondrement de la biodiversité

– En orientant la pêche maritime et les cultures marines vers une association financièrement contrainte avec le développement massif de l’éolien et des autres EnR marines

– En associant à des installations industrielles énergétiques non écoconçues; polluantes et toxiques dont les effets et impacts physiques, chimiques et biologiques ne sont pas ou mal pris en compte ; la pêche artisanale, les cultures marines et une aquaculture industrielle

Le peuple français a le droit de savoir ;

– que l’actuelle politique française des AMP est très majoritairement « une illusion tragique environnementale » et qu’elle le restera tant que les co-usages seront la règle

– que l’Etat ne sera pas capable de garantir l’inocuité sanitaire des productions aquacoles associées aux parcs éoliens face à des normes de qualifications et quantifications des molécules dans l’eau et les produits de la mer qui vont encore se durcir.

A terre, il n’est même pas capable en Occitanie et ailleurs, de produire de « l’eau potable » sous le seuil pour des « perfluorés » et procède par dérogations.

En sera-t-il pareil pour ces productions aquacoles ?

 

Un enjeu spatial de cohabitation d’usage éolien et de cultures marines

Les risques littoraux, les conflits d’usages et limites spatiales pour l’extension des cultures marines font que profiter du développement des parcs éoliens et des autres EnR marines semble une bonne idée pour beaucoup de monde.

Il est tentant de vouloir profiter de la mutualisation des espaces, des synergies matérielles, et de la taxe éolienne des zones prioritaires pour y maintenir la pêche et développer les cultures marines et d’autres formes d’aquaculture.

Nous avons vu que « la nasse de la transition énergétique » que le gouvernement vient de fermer sur les pêcheurs est une très forte contrainte d’acceptabilité socio-économique des EnR en mer et organise une fuite en avant vers la cohabitation des usages.

Il est paradoxal que la volonté d’éloigner les cultures marines et les autres aquacultures des côtes afin de profiter d’une qualité d’eau de mer plus diluée en polluants terrigènes et de beaucoup plus d’espace sans les multiples conflits d’usages qui s’intensifient avec l’augmentation des aménités et des fréquentations littorales aboutisse à une association avec des éoliennes et autres EnR qui sont de multiples sources de pollutions et de toxiques, d’effets physiques qui viendront perturber et nuire à la pêche, aux cultures marines et l’aquaculture en général.

Un de nos membres se souvient du projet d’un cabinet d’architecture qui avait conçu des jackets d’éoliennes très astucieuses qui pouvaient intégrer un élevage de saumons et une AMTI pour un parc éolien écossais. Au contact des polluants et toxiques.

Nous le répétons, si les conséquences délétères des éoliennes et de l’ensemble des intrants des parcs et de leurs organes connexes sur l’environnement océanique étaient supprimées ou suffisamment réduites par une véritable écoconception nous pourrions peut-être les accepter ainsi que l’association de l’aquaculture. Ce n’est pas du tout la situation actuelle.

Et que fait-on des effets aéroliques et hydrauliques très difficilement réductibles ?

Se réjouir de l’effet de récif des jackets et des socles de béton d’éoliennes en se voilant la face sur les risques environnementaux chimiques associés est faire preuve d’un aveuglement coupable.

« La nécessité fait la loi du moment » comme l’exprime l’adage de Sénèque.

Mais la nécessité de soutenir la résilience de la pêche et de développer massivement les cultures marines ne doit se faire, ni contre la qualité sanitaire des productions, ni contre la résilience écosystémique océanique.

 

Remplacer la nature des plastiques

Nous avons vu dans la première partie de cet article que dès 1856, la Parkésine (le celluloïd) associant des traitements chimiques de la cellulose et une huile végétale, première matière plastique thermoformable, était créée pour combler l’effondrement de ressources naturelles, déjà.

L’utilisation massive depuis la ruée vers l’or noir et la course effrénée après les réserves biogènes carbonées ; tourbe, charbon, pétrole, méthane, gaz de schiste tant énergétique que pour toutes les applications plastiques a eu pour effet une augmentation anthropique de gazs à effets de serre dont le corolaire est, paradoxalement, la préservation de multiples autres ressources naturelles qui auraient dû être consommées dans le cas contraire.

Face au mur toxique et de pollution des plastiques industriels actuels à base d’hydrocarbures fossiles « les solutions biomasses » dont les océaniques se multiplient avec plus ou moins de bonheur.

Les micro et macroalgues semblent « des solutions plastiques naturelles » à la condition sine qua non de ne pas participer au recyclage des plastiques actuels avec lesquels des « solutions biodégradables » inacceptables sont en cours de commercialisation.

Au moins les micro-algues seront développées pour de nouveaux carburants. Qui vont recycler le dioxyde de carbone et dont l’usage humain va le libérer dans l’atmosphère alors que les macroalgues peuvent le fixer dans leurs usages industriels, tout comme les arbres à terre.

 

Face au mur toxique, un autre mur

Non moins redoutable à long terme même s’il est, heureusement, d’une tout autre nature bien qu’au bout du compte… Un mur biologique concurrentiel entre le développement des aquacultures végétales et animales industrielles en mer, associées à l’éolien et aux autres EnR ou non et la résilience des chaines trophiques naturelles.

Ne vaut-il pas mieux aider la nature à produire que « produire de la biomasse exportable concurrentielle » qui ne fixera pas forcément le carbone dans la durée ?

C’est comme à terre, la fixation pérenne du carbone qui est importante donc l’usage ou le non-usage consommable de la biomasse produite.

Les choix énergétiques qui sont faits par nos gouvernants actuels vont lourdement peser sur le futur et il n’y aura pas de retour ; écosystémique, alimentaire, sanitaire en arrière possible.

Toute erreur ou faute sera payée comptant par le peuple français et les générations futures.

Il n’existe pas de solution technologique pour sauver le vivant.

Seul le vivant peut sauver le vivant.

L’Etat français ferait bien de ne pas l’oublier dans la priorisation de ses choix politiques.

Fin de la seconde partie.

 

Un chaleureux remerciement à Géraldine et Jeannine, nos homardes préférées, pour la rédaction du conte « le câble et la homarde » qui malgré les réticences de membres du GT Océans et de vieux grincheux a passé, par des corrections, outre le barrage initial du Conseil d’Administration de l’AA.

 

Le chargé de communication de l’Atelier Anonymus,
Chrystophe Grellier

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